Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/402

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pour rester ici à supporter mes maux, m’assister et me secourir. Les Atrides n’ont pas eu tant de constance à tolérer mes douleurs, ces vaillants généraux ! Mais toi, mon fils, noble de cœur et issu de noble race, tu as compté pour rien toutes ces peines que je t’ai causées, sans être rebuté ni par mes cris, ni par l’infection de ma plaie. Et maintenant que le mal semble m’oublier et me laisse quelque relâche, soulève-moi toi-même, et place-moi debout, mon fils, pour qu’une fois soulagé de ma fatigue, nous puissions nous rendre au vaisseau, et nous embarquer sans retard.

NÉOPTOLÈME.

Oui, je me réjouis de te voir, contre notre attente, délivré de tes souffrances et revenu à la vie ; car dans la crise d’où tu sors, les symptômes que tu présentais étaient ceux d’un homme qui n’existe plus. Mais à présent lève-toi toi-même, ou, si tu le préfères, ces hommes te porteront ; car ils n’hésiteront pas devant cette peine, dès que toi et moi nous avons jugé bon qu’ils le fassent.

PHILOCTÈTE.

O mon fils, je te rends grâces ; soulève-moi seulement, comme tu en as l’intention, et laisse aller ces hommes ; je ne veux pas les incommoder par la mauvaise odeur, avant le moment obligé, car ma société ne leur sera que trop à charge sur le vaisseau.

NÉOPTOLÈME.

Soit ; lève-toi donc, et toi-même appuie-toi sur moi.

PHILOCTÈTE.

Ne crains rien ; la longue habitude m’aidera à me relever.

NÉOPTOLÈME.

Hélas ! que ferai-je donc, à partir de ce moment ?

PHILOCTÈTE.

Qu’y a-t-il, mon fils ? où laisses-tu donc errer tes paroles ?