Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/442

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vers nous, la tête couronnée[1] ; signe d’une heureuse nouvelle.



UN MESSAGER.

Déjanire, ma maîtresse, j’accours le premier dissiper tes alarmes. Sache, en effet, que le fils d’Alcmène est vivant, et victorieux, et rapporte du combat des prémices[2] pour les dieux de cette contrée.

DÉJANIRE.

Quelle est, vieillard, cette nouvelle dont tu me parles ?

LE MESSAGER.

Que bientôt ton époux tant désiré va se montrer à toi avec les insignes de la victoire.

DÉJANIRE.

Est-ce d’un des citoyens, ou d’un étranger que tu tiens cette nouvelle ?

LE MESSAGER.

C’est Lichas, le héraut, qui la répand parmi la foule, dans la prairie où paissent les troupeaux ; dès que je l’ai entendue, j’ai couru pour être le premier à te l’annoncer,

obtenir de toi quelque salaire, et mériter ta faveur.

DÉJANIRE.

Mais comment est-il absent, puisque tout prospère ?

LE MESSAGER.

Il ne lui est pas très-facile d’arriver, ô femme ; car tout le peuple de Malie[3] l’entoure et l’interroge, et il ne lui est pas possible d’avancer. Car dans le désir général d’apprendre les faits, la foule avide ne se calmera qu’après

  1. Les messagers, porteurs d’heureuses nouvelles, se couronnaient la tète. Voir Œdipe Roi, v. 82 ; Agamemnon d’Eschyle, v. 493 ; Hippolyte d’Euripide, v. 806 ; Plutus d’Aristophane, v. 757.
  2. Les prémices du butin étaient consacrées aux dieux. Virgile, Énéide, XI, v. 15 :
    Hæc sunt spolia et de rege superbo
    Primitiæ
    Ovide, Fast III, 729 :
    Te memorant, Gange totoque Oriente subacto,
    Primitias magno seposuisse Jovi.
  3. Ville de Thessalie, près de Trachine.