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LE MAIIÀBHARATA. H7

infini d'y relever tout ce qu'il y a de curieux ; bornons-nous à quelques lignes de citation :

Fils de Kounti, c'est la rencontre des éléments qui produit le froid et le chaud, le plaisir et la douleur; tout cela se fait et se défait, tout cela est passager : supporte tout cela, ô Ardjouua... Les corps, ayant une fin, sont au pouvoir de l'âme éternelle, in- destructible, immense. Croire que cette âme tue ou est tuée, c'est ne rien connaître : elle ne nait ni ne meurt; ayant existé nue fois, elle ne cessera plus d'exister; sans naissance, sans mort, perpé- tuelle, primitive, elle survit au corps... Les armes ne peuvent la blesser, ni les flammes la brûler, ni les eaux, l'humecter, ni les vents la rendre aride... Cette âme immortelle et invulnérable se cache au fond de tout ce qui est... Quand même un la concevrait comme sans cesse naissant et sans cesse mourant, encore ne de- vrait-on pas pleurer sur elle : car tout ce qui est né doit mourir, tout ce qui est mort doit renaître. Puisque cela est inévitable, à quoi bon s'affliger? On ne peut saisir ni le commencement ni la fin des êtres; leur milieu seul est saisissable. Qu'y a-t-il là de quoi se lamenter? Toute chose qui tombe sous les sens excite l'amour ou l'aversion : c'est à l'homme de se dérober à ces deux influences; car elles lui sont hostiles. — Mais, dit Ardjouna, pourquoi commet-on le péché, même sans le vouloir, comme si l'on était poussé par une force aveugle? — Cette force, répondit le Bienheureux, c'est le désir, c'est l'emportement, la passion dé- vorante et féconde en crimes : là est l'ennemi. Il atteint tous les êtres, comme la fumée enveloppe la flamme, comme le miroir est terni par l'humidité, comme l'embryon est enfoui dans les flancs maternels ; il corrompt la science, poursuit sans cesse les sages, ne cesse de se renouveler, est plus insatiable que le feu.

Maîtriser ses désirs, étouffer ses appétits, voir avec une égale tranquillité le plaisir et la souffrance, vivre libre, calme et désintéressé; agir, parce qu'on est né pour l'action, mais ne pas attacher la moindre importance aux résultats plus ou moins utiles de ses actes, du moment qu'ils sont conformes au devoir ; échapper, à force de vertus et d'austérités, à la triste nécessité de revenir une fois de plus au monde ; méri- ter, par la conduite qu'on aura tenue ici-bas, la récompense suprême, à savoir l'anéantissement final ou, du moins, l'union

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