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M. Retté ! Et voilà qui rendrait légitimes les attaques de M. Mauclair, si M. Adolphe Retté avait jamais compté dans le mouvement symboliste autrement que par des œuvres incolores et par les soubresauts beaucoup plus colorés de son humeur destructive.

— P.

Revendications Inutiles.

On a beaucoup disserté sur les premiers pas du vers libre. Nous n’avonsjamais pu comprendre l’intérêt que M. Gustave Kahn attachait à cette question. Nul n’a jamais contesté que Les Palais Nomades parurent dans La Vogue en 1886, mais dans le même temps, grâce aux soins mêmes de M. Kahn, que certaines des Fleurs debonne volonté de Jules Laforgue, queles Illuminations d’Arthur Raimbaud(Les Illuminations n’ont jamais été étudiées d’assez près au point de vue technique ; suivant nous, elles sont d’un intérêt primordial). Et quelle que soit la part plus ou moins volontaire de ces deux poètes, M. Gustave Kah n garde le grand honneur, — si l’on ne peut guère le louer de la dénomination vers libre » peu heureuse et prêtant à l’amphibologie, — d’avoir été l’un des premiers symbolistes vraiment conscients, d’en avoir donné la première preuve publique.

Cependant il ne peut méconnaître que cela n’eût pas suffi pour « fonder » le vers libre, qu’aucune forme d’art technique n’a jamais été imposée parla volonté d’un seul, qu’elle doit être sentie par un groupe comme la conséquence fatale d’une évolution, et qu’il est prouvé que sans la recherche simultanée de plusieurs poètes, dont certains alors ignoraient totalement M. Kahn, le vers libre n’aurait eu aucune existence.

Je persiste à croire d’ailleurs que le vers libre initial, c’est-à-dire tel qu’il naissait à l’origine des richesses rythmiques de la prose, n’aurait pu exister sans le parallélisme des libertés de Verlaine, nées de l’évolution logique de l’alexandrin.

C’est la fusion de ces deux courants qui a créé dans ses différentes modalités le véritable vers libre.