Page:Spencer - La Science sociale.djvu/64

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en conclure qu’une réunion d’hommes possède des qualités propres qui résultent des qualités des individus ; et que, suivant que les individus concourant à former une agglomération se rapprochent plus ou moins, par leurs qualités propres, des individus faisant partie d’une autre agglomération, les deux agglomérations seront plus ou moins semblables entre elles, de même que deux agglomérations différeront d’autant plus que les individus qui les composent seront plus dissemblables. Si l’on admet cette vérité qui est presque évidente, il est impossible de contester que, dans toute communauté, il existe un groupe de phénomènes qui est le résultat naturel des phénomènes présentés par les membres de la communauté, qu’en d’autres termes l’agrégat présente une série de propriétés déterminées par la série des propriétés de ses parties, et que les relations entre ces deux séries constituent la matière d’une science. Il suffit de se demander ce qui arriverait si les hommes avaient comme certaines créatures inférieures l’instinct de se fuir, pour comprendre que la possibilité même de la société dépend de l’existence chez l’individu d’une propriété émotionnelle. Il suffit de se demander ce qui arriverait si l’homme avait une préférence pour celui qui lui fait le plus de mal, pour voir que les relations sociales seraient entièrement différentes (en supposant même qu’il y en eût de possibles) des relations sociales établies par la tendance inhérente à tout homme de préférer celui qui lui procure le plus de plaisir. Il suffit de se demander ce qui arriverait, si, au lieu de rechercher les moyens les plus faciles d’atteindre un but donné, les hommes recherchaient les moyens les plus difficiles, pour deviner que la société (s’il pouvait en exister une dans ces conditions) ne ressemblerait en rien à aucune de celles que nous connaissons. Si, comme on le voit par ces cas extrêmes, les caractères principaux d’une société correspondent aux caractères principaux de l’homme, il est hors de question qu’il en sera de même pour les caractères secondaires, et qu’il existera toujours un consensus entre la structure et les actions de l’une et de l’autre.

Partant de ce principe, que les propriétés des unités déterminent les propriétés de l’agrégat, nous en concluons qu’il doit y avoir une science sociale exprimant les relations