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ÉTHIQUE

que les hommes aperçussent ces préjugés communs, et fussent conduits à la connaissance vraie des choses.

J’ai assez expliqué par là ce que j’ai promis en premier lieu. Pour montrer maintenant que la Nature n’a aucune fin à elle prescrite et que toutes les causes finales ne sont rien que des fictions des hommes, il ne sera pas besoin de longs discours. Je crois en effet l’avoir déjà suffisamment établi, tant en montrant de quels principes et de quelles causes ce préjugé tire son origine que par la Proposition 16 et les Corollaires de la Proposition 32, et en outre par tout ce que j’ai dit qui prouve que tout dans la nature se produit avec une nécessité éternelle et une perfection suprême. J’ajouterai cependant ceci : que cette doctrine finaliste renverse totalement la Nature. Car elle considère comme effet ce qui, en réalité, est cause, et vice versa. En outre, elle met après ce qui de nature est avant. Enfin elle rend très imparfait ce qui est le plus élevé et le plus parfait. Pour laisser de côté les deux premiers points (qui sont évidents par eux-mêmes), cet effet, comme il est établi par les Propositions 21, 22 et 23,