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DIEU, L’HOMME ET LA BÉATITUDE

serait pas absolument infini et parfait dans son genre (contre la 3e proposition). Et puisque la nature ou Dieu est l’être dont on affirme un nombre infini d’attributs, et qui comprend en soi les essences de toutes les créatures, il doit se produire nécessairement dans la pensée une idée infinie, qui contienne en soi objectivement la nature, telle qu’elle existe réellement.

2o Toutes les autres modifications, telles que l’amour, le désir, la joie, tirent leur origine de cette première modification immédiate, de telle sorte que, si celle-ci ne précédait pas, les autres ne pourraient pas être. D’où il suit évidemment que le désir naturel, qui est, dans toute chose, de conserver son propre corps, n’a d’autre origine que l’idée ou essence objective de ce corps, telle qu’elle existe dans l’attribut de la pensée. De plus, puisque rien n’est exigé pour l’existence de cette idée ou essence objective que l’attribut de la pensée, et l’objet, ou essence formelle, il est donc certain, comme nous le disions, que l’idée ou essence objective est la modification la plus immédiate de l’attribut de la pensée. C’est pourquoi, dans cet attribut, il ne peut y avoir aucune autre modification, appartenant essentiellement à l’âme d’un objet quelconque, sinon cette seule idée, laquelle doit être, dans l’attribut pensée, l’idée d’une chose réellement existante, car une telle idée emporte avec elle toutes les autres modifications, telles que l’amour, le désir, la joie. Donc, cette idée procédant de l’existence de l’objet, il s’ensuit que, l’objet étant détruit ou changé en raison de cette destruction et de ce changement, l’idée doit être elle-même détruite et changée, puisqu’elle est essentiellement unie à son objet.

    attribuons aujourd’hui : formellement veut dire réellement ; objectivement veut dire par représentation. P. J.