Page:Staël - Œuvres inédites, II.djvu/236

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

conservé le cœur françois, le sang françois, le goût françois…

SOPHIE.

Au moins, mon père, pas tout-à-fait l’accent françois.

M. DE MORLIÈRE.

Quoi ! parce que j’ai le malheur de prononcer quelques mots un peu durement, tu as la cruauté de me le reprocher ? — C’est pour avoir vécu avec ces maudits Allemands, que j’ai perdu quelque chose de la grâce de mon langage ; c’est pour cela aussi que je veux un gendre françois, qui corrigera ma prononciation, arrangera tout ici à la françoise, et me racontera ces beaux temps de Louis xiv, dont mon grand père me parloit toujours dans mon enfance.

SOPHIE.

Mais, mon père, M. le comte d’Erville que vous voulez me donner pour mari, est l’homme du monde le moins propre à vous raconter ce qui pourroit vous intéresser à cet égard. J’aime assurément les François autant que vous ; mais celui-ci n’est rien que la caricature de leurs défauts, et tout au plus celle de leurs agrémens. Il est venu à Berlin, dit-il, pour