Page:Staël - Œuvres inédites, II.djvu/309

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disoit : Sapho, je reviendrai demain ? Et ne me l’a-t-il pas dit la veille de la fête de Mitylène ? Il reviendra ; je l’attends. Quel est donc le charme qui le retient ? Cléone, tu étois à cette fête : y avoit-il une jeune fille dont la beauté pût faire oublier l’âme de Sapho ? réponds-moi ; y en avoit-il une ?

CLÉONE, à part.

Ah quel supplice !

SAPHO.

Tu gardes le silence ! Tu as raison de ne pas accuser Phaon : tu sais, Cléone, tu sais que ce n’est pas ainsi que l’on guérit le cœur. Cela fait tant souffrir d’entendre condamner l’objet qu’on aime, même pour le mal qu’il nous a fait ! Ah ! je le défendrois encore contre tous, avec le reste de vie qu’il m’a laissé.

ALCÉE.

C’est aujourd’hui la fête d’Apollon ; Sapho, n’y paroîtrez-vous point ?

SAPHO.

Moi paraître dans une fête ! Le voulez-vous ? Est-ce pour rappeler aux mortels enivrés par le plaisir toute la puissance de la douleur ? Voulez-vous que je sois là comme un monu-