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GENEVIÈVE DE BRABANT.

L’ENFANT.

Comment donc ce jour seroit-il différent de tous nos jours ? Le soleil doit-il nous éclairer plus tard qu’à l’ordinaire ? me raconteras-tu quelque belle histoire merveilleuse dont je rêverai toute la nuit, ou la biche qui m’a nourrie, quand tes forces étoient épuisées, se seroit-elle éloignée de nous ? Ah ! que j’en serois triste !

GENEVIÈVE.

Non, mon enfant. Tiens, regarde ; ne la vois-tu pas ta biche ? elle est à l’entrée de notre grotte ; mais il faut la quitter, cette grotte. Nous partons.

L’ENFANT.

Que veux-tu dire, nous partons ? allons-nous plus loin que la forêt qui est là-bas, et que tu ne m’as jamais permis de parcourir ? Ah ! quelle joie !

GENEVIÈVE.

Pauvre enfant ! comme tu prononces le mot de joie ! Ah ! tu ne sais pas combien de fois ces présages de l’espérance ont été trompés ! Nous quittons pour jamais cette demeure, la seule que tu connoisses depuis ta naissance.

L’ENFANT.

Pour jamais ! que veux-tu dire, ma mère ? combien de temps cela fait-il, jamais ?