Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, version abrégée Belin de Launay, 1876.djvu/125

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les bagages par terre, et les hommes, réunis par groupes, s’entretenant et gesticulant d’un air irrité. J’enlévai mon fusil des mains de Sélim, j’y glissai deux charges de plomb, j’ajustai mes revolvers et j’allai droit aux mécontents. De leur côté, mes gens avaient pris leurs armes, et deux d’entre eux, dont les têtes se voyaient au-dessus d’une fourmilière, avaient le fusil braqué sur ma route. L’un de ces derniers était Asmani ; le second, Mabrouki, son inséparable ; tous deux avaient été les guides du cheik Ben Nasib.

Je jetai le canon de mon fusil, dans le creux de ma main gauche et, les tenant en joue, je les menaçai de leur faire sauter la cervelle, si, à l’instant même, ils ne venaient pas s’expliquer. Comme il aurait été dangereux de ne pas bouger, ils quittèrent leur retraite.

Asmani avança d’un pas oblique, en affectant de sourire, mais ayant dans le regard le sombre feu du meurtre. L’autre se glissa derrière moi, et versa de la poudre dans le bassinet de mon mousquet. Je me retournai vivement, et lui mis le canon de mon fusil à deux pieds de la figure : l’arme lui tomba des mains ; je le repoussai avec la mienne, et le fis rouler à dix pas. Regardant alors Asmani, l’homme gigantesque, je lui ordonnai de désarmer. En disant cela, je levai mon fusil et pressai sur la détente ; jamais homme n’a été plus près de la mort.

Il me répugnait de répandre le sang ; je ne demandais certes pas mieux que d’éviter ce malheur ; mais, si je n’arrivais pas à mater ce brutal, s’il ne pliait pas à l’instant même, c’en était fait de mon autorité.