Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/18

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fort inexpugnable environné de cinq enceintes qui en rendent l’abord impos­sible, une tour mince et élevée, au haut le pavillon tricolore. Tout-à-coup, dix-neuf coups de canon sont tirés, une pluie de terre tombe dans le lac, et salit un ins­tant ses eaux limpides. Nous descendons après avoir lutté trois quarts d’heure contre une tempête assez forte. Le len­demain matin, après avoir fait la visite du fort, nous nous rembarquons sur des barques canonnières autrichiennes ; nous sortons d’un petit port environné de mer ; nous prenons le large, aussitôt une superbe statue du bon saint Charles frappe nos regards, elle a soixante-neuf pieds de haut, et son piédestal vingt ; elle montre majestueusement le port d’une main ; de l’autre saint Charles tient un pan de son surplis ; c’est par ce pan qu’on entre dedans. Un homme se tient droit dans son nez, elle est tranquille au milieu du lac. Rien ne l’avait troublée depuis longtemps, lorsque, dernièrement, au siège d’Arona, une balle vint la frapper à la poitrine, heureusement elle n’a pas été endommagée. Jamais je n’ai vu un si bel aspect : les expressions manquent à mes sentiments. Nous voguions tran­quillement, j’étais à côté de l’amiral de la flotte ennemie, je faisais la conversation