Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/230

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Remarque qu'on n'est jamais en colère contre les hommes que pour avoir trop compté sur eux : Rousseau a été mal­heureux toute sa vie, parce qu'il cherchait un ami comme il en a existé peut-être une dizaine depuis Homère jusqu'à nous. Pour moi, je crois que tu n auras jamais de meilleur ami que moi ; lorsque nous serons vieux, nous pourrons nous réunir et passer huit mois à Paris et quatre à Glaix. Si le hasard me donnait quelque fortune, j'en achèterais un petit château près de Milan, pays délicieux, à Canonica, sur l'Adda, entre Milan et Bergame. Nous pourrions y passer, de temps en temps, deux mois de printemps : voilà mes projets les plus éloignés; souviens-t'en pour voir si nous changerons.

Quand à la liberté, elle n'est pas le partage des femmes dans nos mœurs : jusqu'à quarante ans, elles doivent mé­nager les sots qui font la majorité du public et qui dispensent la réputation, le bien le plus précieux des femmes.

Ces animaux-là sont très vaniteux, c'est leur caractère distinctif ; ménage donc leur vanité. Tu dojs comprendre à quel point ils détestent une femme plus instruite qu'eux, pusqu'ils abhorrent déjà un homme sage.

A demain.