Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/345

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faire le plus celles qui restent. Le degré de bonheur dont on est susceptible se mesure alors sur le degré de force des passions. Il faut considérer que ce sont les hommes avec qui vous êtes destiné à vivre qui vous rendront heureux et mal­heureux. Ici, comme nousfaisons la même étude, nous pourrons nous être utiles, et bien plus que deux amis de même sexe, en ce que, avec une âme sensible, le bon­heur dépend toujours beaucoup de l'autre, et que tu m'aideras à connaître les femmes, tandis que je pourrai te dire ce que je sais des hommes. Regarde, ma bonne amie, que tout nous unit, et que, quand nous ne nous aimerions pas, le froid in­térêt nous rassemblerait encore, et nous pouvons nous croire malheureux S

Les hommes que nous rencontrerons, dans le voyage de la vie que nous com­mençons, seront ou, comme nous, âmes ardentes, ou entièrement froids et secs, ou entre deux. Le nombre des âmes ardentes est infiniment petit, et il est très aisé de s'y méprendre. Nous sommes les amis nés de ces grandes âmes, nous sommes dépo­sitaires de leur bonheur, comme elles du nôtre. Il suffit de se connaître pour s'aimer à jamais ; nous pourrons avoir les plus grands torts avec elles, elles avec nous, nous finirons toujours par être re-