Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/250

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

éternel ; mais mademoiselle peut croire que, grâce au ciel, il n’existe aucune sorte de danger : M. le gouverneur doit être traité pour avoir pris, par erreur, une trop forte dose de laudanum ; mais, j’ai l’honneur de le répéter à mademoiselle, le laquais chargé du crime ne faisait point usage de poisons véritables, comme Barbone, lorsqu’il voulut empoisonner monseigneur Fabrice. On n’a point prétendu se venger du péril qu’a couru monseigneur Fabrice ; on n’a confié à ce laquais maladroit qu’une fiole où il y avait du laudanum, j’en fais serment à mademoiselle ! Mais il est bien entendu que, si j’étais interrogé officiellement, je nierais tout.

D’ailleurs, si mademoiselle parle à qui que ce soit de laudanum et de poison, fût-ce à l’excellent don Cesare, Fabrice est tué de la main de mademoiselle. Elle rend à jamais impossible tous les projets de fuite ; et mademoiselle sait mieux que moi que ce n’est pas avec du simple laudanum que l’on veut empoisonner monseigneur ; elle sait aussi que quelqu’un n’a accordé qu’un mois de délai pour ce crime, et qu’il y a déjà plus d’une semaine que l’ordre fatal a été reçu. Ainsi, si elle me fait arrêter, ou si seulement elle dit un mot à don Cesare ou à tout autre, elle retarde toutes nos entreprises de bien plus