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ordres de l’Église, de la tradition, etc., etc., dès lors il est perdu. Quand bien même, ce qui est horriblement faux et criminel à dire, cette méfiance envers l’autorité des princes établis de Dieu donnerait le bonheur pendant les vingt ou trente années de vie que chacun de nous peut prétendre, qu’est-ce qu’un demi-siècle ou un siècle tout entier, comparé à une éternité de supplices ? etc.

On voyait, à l’air dont Fabrice parlait, qu’il cherchait à arranger ses idées de façon à les faire saisir le plus facilement possible par son auditeur ; il était clair qu’il ne récitait pas une leçon.

Bientôt le prince ne se soucia plus de lutter avec ce jeune homme dont les manières simples et graves le gênaient.

— Adieu, monsignore, lui dit-il brusquement, je vois qu’on donne une excellente éducation dans l’académie ecclésiastique de Naples, et il est tout simple que quand ces bons préceptes tombent sur un esprit aussi distingué, on obtienne des résultats brillants. Adieu ; et il lui tourna le dos.

Je n’ai point plu à cet animal-là, se dit Fabrice.

Maintenant il nous reste à voir, dit le prince dès qu’il fut seul, si ce beau jeune homme est susceptible de passion pour quelque chose, en ce cas il serait complet… Peut-on répéter avec plus d’esprit les leçons de la tante ? Il me semblait l’entendre parler ; s’il y avait une révolution chez moi, ce serait elle qui rédigerait le Moniteur,