Page:Stendhal - La chartreuse de Parme (Tome 1), 1883.djvu/320

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— C’est que nous sommes environnés d’événements tragiques, répliqua le comte aussi avec émotion ; nous ne sommes pas ici en France, où tout finit par des chansons ou par un emprisonnement d’un an ou deux, et j’ai réellement tort de vous parler de toutes ces choses en riant. Ah çà ! mon petit neveu, je suppose que je trouve jour à vous faire évêque, car bonnement je ne puis pas commencer par l’archevêché de Parme, ainsi que le veut, très-raisonnablement, madame la duchesse ici présente ; dans cet évêché où vous serez loin de nos sages conseils, dites-nous un peu quelle sera votre politique ?

— Tuer le diable plutôt qu’il ne me tue, comme disent fort bien mes amis les Français, répliqua Fabrice avec des yeux ardents ; conserver par tous les moyens possibles, y compris le coup de pistolet, la position que vous m’aurez faite. J’ai lu dans la généalogie des del Dongo l’histoire de celui de nos ancêtres qui bâtit le château de Grianta. Sur la fin de sa vie, son bon ami Galeas, duc de Milan, l’envoie visiter un château fort sur notre lac ; on craignait une nouvelle invasion de la part des Suisses. — Il faut pourtant que j’écrive un mot de politesse au commandant, lui dit le duc de Milan en le congédiant. Il écrit et lui remet une lettre de deux lignes ; puis il la lui redemande pour la cacheter : Ce sera plus poli, dit le prince. Vespasien del Dongo part, mais