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le rouge et le noir

envers elle. Souvent il alla jusqu’aux réponses peu polies.

Quelque résolu qu’il fût à ne pas être dupe des marques d’intérêt de Mathilde, elles étaient si évidentes de certains jours, et Julien, dont les yeux commençaient à se dessiller, la trouvait si jolie, qu’il en était quelquefois embarrassé.

L’adresse et la longanimité de ces jeunes gens du grand monde finiraient par triompher de mon peu d’expérience, se dit-il ; il faut partir et mettre un terme à tout ceci. Le marquis venait de lui confier l’administration d’une quantité de petites terres et de maisons qu’il possédait dans le bas Languedoc. Un voyage était nécessaire : M. de La Mole y consentit avec peine. Excepté pour les matières de haute ambition, Julien était devenu un autre lui-même.

Au bout du compte, ils ne m’ont point attrapé, se disait Julien en préparant son départ. Que les plaisanteries que mademoiselle de La Mole fait à ces messieurs soient réelles ou seulement destinées à m’inspirer de la confiance, je m’en suis amusé.

S’il n’y a pas conspiration contre le fils du charpentier, mademoiselle de La Mole est inexplicable, mais elle l’est pour le marquis de Croisenois du moins autant que pour moi. Hier, par exemple, son