de l’entendre. Du reste, en politique, il était cynique effronté.
— Je suis indépendant, moi, disait-il à un monsieur portant trois plaques, et dont apparemment il se moquait. Pourquoi veut-on que je sois aujourd’hui de la même opinion qu’il y a six semaines ? En ce cas, mon opinion serait mon tyran.
Quatre jeunes gens graves, qui l’entouraient, firent la mine ; ces messieurs n’aiment pas le genre plaisant. Le comte vit qu’il était allé trop loin. Heureusement il aperçut l’honnête M. Balland, tartufe d’honnêteté. Le comte se mit à lui parler : on se rapprocha, on comprit que le pauvre Balland allait être immolé. À force de morale et de moralité, quoique horriblement laid, et après des premiers pas dans le monde difficiles à raconter, M. Balland a épousé une femme fort riche, qui est morte ; ensuite une seconde femme fort riche, que l’on ne voit point dans le monde. Il jouit en toute humilité de soixante mille livres de rente, et a lui-même des flatteurs. Le comte Chalvet lui parla de tout cela et sans pitié. Il y eut bientôt autour d’eux un cercle de trente personnes. Tout le monde souriait, même les jeunes gens graves, l’espoir du siècle.
Pourquoi vient-il chez M. de La Mole,