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l’hôtel de la mole

où il est le plastron évidemment ? pensa Julien. Il se rapprocha de l’abbé Pirard. pour le lui demander.

M. Balland s’esquiva.

— Bon ! dit Norbert, voilà un des espions de mon père parti ; il ne reste plus que le petit boiteux Napier.

Serait-ce là le mot de l’énigme ? pensa Julien. Mais, en ce cas, pourquoi le marquis reçoit-il M. Balland ?

Le sévère abbé Pirard faisait la mine dans un coin du salon, en entendant les laquais annoncer.

— C’est donc une caverne, disait-il comme Basile, je ne vois arriver que des gens tarés.

C’est que le sévère abbé ne connaissait pas ce qui tient à la haute société. Mais, par ses amis les jansénistes, il avait des notions fort exactes sur ces hommes qui n’arrivent dans les salons que par leur extrême finesse au service de tous les partis, ou leur fortune scandaleuse. Pendant quelques minutes, ce soir-là, il répondit d’abondance de cœur aux questions empressées de Julien, puis s’arrêta tout court, désolé d’avoir toujours du mal à dire de tout le monde, et se l’imputant à péché. Bilieux, janséniste, et croyant au devoir de la charité chrétienne, sa vie dans le monde était un combat.