Page:Stendhal - Lucien Leuwen, II, 1929, éd. Martineau.djvu/304

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— C’est l’unique moyen, disait-il à madame Leuwen, de parer au coup de pistolet si toutefois nous en sommes là, ce que je suis loin de croire. Sa vertu si ennuyeuse l’empêcherait seule de nous laisser seuls et, outre cela, il y a l’amour de la vie et la curiosité de lutter avec le monde.

Par amitié pour sa femme, M. Leuwen s’était entièrement appliqué à résoudre ce problème.

— Vous ne pouvez vivre sans votre fils, lui disait-il, et moi sans vous. Et je vous avouerai que depuis que je le suis de près il ne me semble plus aussi plat. Il répond quelquefois aux épigrammes de son ministre, et la ministresse l’admire. Et, à tout prendre, les jeunes reparties un peu trop vertes de Lucien valent mieux que les vieilles épigrammes sans pointe du de Vaize… Reste à voir comment il prendra la première friponnerie de Son Excellence.

— Lucien a toujours la plus haute idée des talents de M. de Vaize.

— C’est là notre seule ressource ; c’est une admiration qu’il faut soigneusement entretenir. Cela est capital pour nous. Mon unique ressource, après avoir nié tant que je pourrai le coup de canif donné à la probité, sera de dire : Un ministre de