Page:Stendhal - Lucien Leuwen, II, 1929, éd. Martineau.djvu/392

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sans rien se permettre que l’on ne pût avouer. C’était comme la diplomatie de Louis XIV quand il était heureux.

Son mari, colonel de la garde nationale, avait bien remplacé les Rohan et les Montmorency, politiquement parlant, mais quant à elle, personnellement, sa fortune était encore à faire.

Qu’est-ce qu’une Montmorency, à peine âgée de vingt-trois ans et avec une immense fortune ferait de son bonheur ?

Et même, ce n’était pas encore là toute la question :

Ne fallait-il pas faire encore autre chose pour arriver à être regardée dans le monde, à peu près comme cette Montmorency l’eût été ?

Une haute et sublime dévotion, ou bien avoir de l’esprit comme madame de Staël, ou bien une illustre amitié ; devenir l’amie intime de la reine ou de madame Adélaïde et une sorte de madame de Polignac de 1785, être ainsi à la tête de la cour des femmes et donner des soupers à la reine ; ou bien il fallait au moins une illustre amitié dans le faubourg Saint-Germain.

Toutes ces possibilités, tous ces partis, occupaient tour à tour son esprit et l’accablaient, car elle avait plus de persévérance et de courage que d’esprit. Et elle ne savait