Page:Stendhal - Lucien Leuwen, II, 1929, éd. Martineau.djvu/409

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sur une chose que vous savez sans doute, mais que je n’ai jamais avouée à âme qui vive.

— Diable ! c’est du neuf, en ce cas. Je ne t’en parlerai jamais.

— Je tiens, ajouta Lucien d’une voix brève et rapide et en regardant le parquet, à être fidèle à une maîtresse que je n’ai jamais eue. Le moral entre pour si peu dans mes relations avec mademoiselle Raimonde, qu’elle ne me donne presque pas de remords ; mais cependant… (vous allez vous moquer de moi) elle m’en donne souvent… quand je la trouve gentille[1]. Mais quand je ne lui fais pas la cour…, je suis trop sombre, et il me vient des idées de suicide, car rien ne m’amuse… Répondre à votre tendresse est seulement un devoir moins pénible que les autres. Je n’ai trouvé de distraction complète qu’auprès du lit de ce malheureux Kortis…, et encore à quel prix ! Je côtoyais l’infamie… Mais vous vous moquerez de moi, dit Lucien en osant relever les yeux à la dérobée.

— Pas du tout ! Heureux qui a une passion, fût-ce d’être amoureux d’un diamant, comme cet Espagnol dont Talle-

  1. Excuse : Voltaire et les auteurs de son siècle renoncent à une nuance quand elle ne peut pas être rendue avec clarté.