Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/198

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— À propos, mon père est député de l’Aveyron, après trois ballottages et à la flatteuse majorité de deux voix.

— Vous ne m’aviez pas parlé de sa candidature.

— Je la trouvais ridicule, et d’ailleurs je n’eus pas le temps d’y trop songer. Je la sus par ce courrier extraordinaire qui donna une pâmoison à M. de Séranville. »

Deux jours après, le comte de Vaize dit à Leuwen :

— J’ai à vous faire lire ce papier.

C’était une première liste de gratifications à propos des élections. Le ministre, en la lui donnant, souriait d’un air de bonté qui semblait dire : « Vous n’avez rien fait qui vaille, et cependant voyez comme je vous traite. » Leuwen lisait la liste, il y avait trois gratifications de dix mille francs, et à côté des noms des gratifiés le mot succès ; la quatrième ligne portait : « M. Leuwen, maître des requêtes, non succès, M. Mairobert nommé à une majorité d’une voix, mais un zèle remarquable, sujet précieux, 8.000 francs. »

— Eh bien, dit le ministre, tient-on la parole que l’on vous donna à l’Opéra ?

Leuwen vit sur la liste que le petit nombre d’agents qui n’avaient pas réussi n’avaient que des gratifications de 2.500