Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/160

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des habitants, et aussi au défaut de capacité des préfets. Ces messieurs récompensent au hasard, et d’ailleurs l’on ne manque pas de les changer au bout de trois ou quatre ans, c’est-à-dire dès qu’ils commencent à connaître un peu le pays qu’ils administrent. La plupart, même après plusieurs années, ne se doutent pas de ce qui se passe autour d’eux. Ils agissent presque toujours suivant les passions d’un secrétaire général, ou d’un conseiller de préfecture, qu’ils croient le plus honnête homme du monde, et ce meneur a les vues élevées et le caractère généreux d’un procureur avide et narquois. Ces préfets, avant 1830, ne peuvent pas se flatter de diriger une seule volonté dans leurs départements ; ils les achètent, tout au plus avec des bureaux de tabac et des croix, quand toutefois les députés ne leur enlèvent pas ces moyens et ne s’en servent pas pour leur propre compte.

Si jamais les élections sont plus sincères qu’avant 1830, ces peuplades du Midi commenceront à prendre quelque intérêt au gouvernement. Jusqu’en 1830[1], elles le regardaient comme un ennemi tout-puissant, qui exige l’impôt et la cons-

  1. Sur l’exemplaire Primoli Stendhal biffe partout cette date trois fois répétée, voulant bien indiquer que d’après lui 1830 n’a rien changé à la politique des préfets. N. D. L. É.