Aller au contenu

Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/198

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pour qu’il eût des maîtres qui enseigneraient à lire et qu’il n’y a point de sorciers :

— Gardons-nous-en bien, monsieur ! s’est écrié M. de M. avec l’accent de la passion.

Quant à moi, je juge de la moralité politique d’un homme par son plus ou moins de haine pour l’instruction. Dans les régions élevées, où, pour garder sa place, l’on n’ose plus haïr l’instruction, on hait du moins l’esprit et l’on protège les savants. Seconde imprudence, on dira de moi que je suis un méchant, un homme noir ; hélas je m’aperçois tous les jours du contraire.

Nous passons rapidement devant Tournus, jolie petite ville bâtie sur la rive droite de la Saône.

Ce même M. de M., qui s’est récrié contre l’instruction que je voulais donner aux paysans de Dombes, connaît bien ce pays-ci, qui est le sien. C’est un esprit sec, exact, mais très orné ; il aime mieux parler des circonstances physiques ou historiques du pays que de ses circonstances morales ; il m’apprend que Tournus a, comme Châlon, sa colonne antique pêchée dans la Saône il y a quelques années.

La conversation de M. de M. a une