Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/281

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donner l’idée d’un pareil repas. Ces messieurs, la plupart riches négociants, font très bien une promenade de quatre-vingts lieues pour aller acheter sur les lieux tel vin célèbre. J’ai appris les noms de trente sortes de vins de Bourgogne, le vin aristocratique par excellence, comme disait l’excellent Jacquemont. Ce qu’il y a d’admirable dans ces dîners, c’est qu’une heure après on a la tête aussi fraîche que le matin, après avoir pris une tasse de chocolat.

Lyon abonde en poissons, en gibier de toute espèce, en vins de Bourgogne ; avec de l’argent, comme partout, on y a des vins de Bordeaux excellents, et enfin Lyon possède des légumes qui réellement n’ont que le nom de commun avec ces herbes insipides que l’on ose nous servir à Paris.

M. Robert, ancien capitaine de l’armée d’Italie de 1796, ne savait pas seulement faire fortune, il inventait des idées plaisantes ; par exemple, en me présentant à ces hommes admirables qui savent si bien vivre au milieu de la morosité actuelle, il me donna un rôle sans m’en avoir prévenu, il sut si bien mentir sur mon compte, que malgré mon ignorance, je ne déplus pas trop, et je m’amusai comme un fou en soutenant ses mensonges. Il fallait vaincre ou périr.