Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/313

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aux prétentions de ces dames, et à leur excessif amour du pouvoir, qui a succédé à l’amour tout court. Dans un club, je dis tout ce qui me passe par la tête, je m’amuse, j’ai de l’esprit. Chez les dames de 1837[1] il y a toujours un, deux, quatre mensonges gros comme des montagnes, et parfaitement étrangers à la galanterie, qu’il faut respecter.

À la vérité cette gêne donne naissance à tout un genre d’esprit que la liberté anéantit en un moment, j’appellerai ce genre l’inuendo, ou l’apologue : égratigner avec décence et imprévu, la décence ou la religion. Par conséquent un sot est réduit au silence. Au club, un sot saisit hardiment la parole pour vous prouver que la liberté est utile. On lui tourne le dos, il est vrai, mais il continue à pérorer. M. D… s’endort dans ce cas-là, quand on l’abandonne ; c’est qu’il s’est écouté lui-même, disait Gérard. Mais, tourner le dos ! ce geste est grossier, et froisse la sensibilité même de celui qui est réduit à l’employer.

Un jeune Grenoblois nous disait ce soir : On dit les poëtes fort embarrassés pour décrire le paradis ; pour moi, je ne demanderais à Dieu que peu de choses : d’abord, ma santé d’aujourd’hui ;

  1. Pardon pour tous ces 1837. Je veux dire que j’espère qu’on sera autrement en 1847.