Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/318

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passer à Lyon, et je n’ai pas osé me présenter tout seul à la société des Dîneurs, c’eût été trop évidemment solliciter une invitation ; car, à des connaisseurs de ce mérite, il ne peut pas être question d’offrir un ignoble dîner à une auberge quelconque.

Ce qui manque surtout au caractère lyonnais, c’est ce qui aurait pu faire excuser ma démarche gastronomique, c’est l’esprit osé, l’imprudence aventureuse la présence d’esprit, la gaieté du gamin de Paris.

Ce n’est pas que le caractère du gamin de Paris me plaise : cet être quoique si jeune, a déjà perdu la gentillesse, et surtout la naïveté de l’enfance ; il calcule jusqu’à quel point il peut profiter du privilège de sa jeunesse pour se permettre des impertinences. C’est déjà le Parisien de vingt-cinq ans. Il tire parti de sa position avec adresse et sang-froid pour se donner la supériorité sur la personne avec laquelle il traite, et son assurance décroît pour peu qu’il trouve de résistance.

Ce n’est point ma vanité froissée qui abhorre le gamin de Paris, c’est l’amour que j’ai pour les grâces de l’enfance qui souffre en la voyant dégradée.

Hazlitt, homme d’esprit, Anglais et misanthrope, prétendait qu’à Paris le