Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/321

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madone fait la moue pour être grave et respectueuse. Elle n’est pas grave malgré elle, comme les vierges de ce Raphaël que M. Ingres imite.

Voyez le Henri IV du pont Neuf : c’est un conscrit qui craint de tomber de cheval. Le Louis XIV de la place des Victoires est plus savant : c’est M. Franconi faisant faire des tours à son cheval devant une chambrée complète.

Marc-Aurèle, au contraire, étend la main pour parler à ses soldats, et n’a nullement l’idée d’être majestueux pour s’en faire respecter.

— Mais, me disait un artiste français, et triomphant de sa remarque, les cuisses du Marc-Aurèle rentrent dans les côtes du cheval.

Je réponds :

— J’ai vu une lettre de l’écriture de Voltaire avec trois fautes d’orthographe.

J’aurais pu donner une vive jouissance à ce brave homme, en lui apprenant que, contrairement aux idées du savant M. Quatremère, la statue de Marc-Aurèle est toute de pièces et de morceaux. Avec quelle vanité n’eût-il pas triomphé de la supériorité des fondeurs actuels ! C’est ainsi que les artistes qui ont fait les statues de l’abbaye du Brou, dans le Bugey, savaient faire une feuille de vigne sépa-