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Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/344

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DÉSAVANTAGE DU TOURISTE

crire ? Je réponds : Il y a huit ans que j’allai à Caen ; j’y suis retourné cette année, et j’ai vu que je n’avais gardé aucun souvenir ni du caractère apparent des habitants, ni des deux églises de Guillaume et de Mathilde, et pourtant j’y avais séjourné. Si je retourne aux colonies, j’aurais bien vite oublié les détails caractéristiques de la France actuelle, qui eux-mêmes auront disparu dans dix ans. Voilà le pourquoi de ce journal ; c’est parce que la France change vite que j’ai osé l’écrire : mais je n’en imprime qu’une petite moitié. À quoi bon choquer inutilement l’opinion régnante ? Ce qui me fait penser que cette opinion ne durera pas, c’est qu’elle n’est qu’un intérêt ; et le Français n’a pas la prudence anglaise, il peut s’ennuyer même de son intérêt. Les âmes nobles seront les premières à se révolter contre le genre hypocrite et ennuyeux. Après la révolte, on pourra donner une seconde édition plus complète, si dans l’intervalle personne n’a mieux fait.

Vous rappelez-vous notre enthousiasme pour les Grecs ? Qui songe aujourd’hui à ces gens-là ? Et de plus nous avons fait de belles choses en leur faveur. Un petit Bavarois dévot fait pendre les braves guerriers de l’insurrection.

On parlait beaucoup hier à Vienne et