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Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/395

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MÉMOIRES D’UN TOURISTE

façades de leurs temples. Avant cette découverte assez récente, les savants d’académie maudissaient cette pratique.

Mon correspondant a voulu absolument me conduire au jardin de Mont-Joly, à vingt minutes de la ville ; j’y ai trouvé une magnifique allée de vieux arbres qui, à elle seule, vaudrait un voyage de dix lieues. Et je n’ai pu donner qu’une heure et demie à cette ville de Clermont ! Sa position rappelle les plus jolies villes de la Suisse, avec cette différence, en sa faveur, qu’elle est bâtie en lave, et que la présence d’un volcan, même éteint, imprime toujours au paysage quelque chose d’étonnant et de tragique qui empêche l’attention de se lasser. Il me semble que le lecteur est d’avis que rien ne conduit aussi vite au bâillement et à l’épuisement moral que la vue d’un fort beau paysage : c’est dans ce cas que la colonne antique la plus insignifiante est d’un prix infini ; elle jette l’âme dans un nouvel ordre de sentiments.

Mon séjour si bref à Clermont a encore eu le temps d’être pollué par des plaintes. J’étais dans le ciel ; cette réclamation d’une maison de nos amies contre une autre maison également amie m’a fait tomber dans la boue. Quand serai-je riche assez pour n’avoir plus de rapports forcés avec aucun homme ? La postérité dira :