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LES CANTALS

L’envieux dix-neuvième siècle ; c’est la triste épithète qu’il mérite en France. Tous les tracas d’aujourd’hui étaient excités par l’envie.

Si j’avais huit jours à moi il me semble que je les emploierais fort bien dans les Cantals aux environs de Saint-Flour. Il y a là des solitudes dignes des âmes qui lisent avec plaisir les sonnets de Pétrarque ; mais je ne les indiquerai pas plus distinctement, afin de les soustraire aux phrases toutes faites et aux malheureux superlatifs des faiseurs d’articles dans les revues.

Ce soir par mes façons de parler franches et imprudentes, j’ai conquis le mépris d’un marchand de fer bien plus considérable que moi, et homme d’esprit, mais de cet esprit rococo qui régnait il y a vingt ans ; il admire la biographie Michaud. J’avouerai que depuis que j’ai atteint deux mille écus de rente, je ne songe plus à la prudence ; c’est trop d’ennui pour mon peu d’ambition.

Si l’on veut passer pour capable, il faut dans la France d’aujourd’hui parler d’un air dolent, ne jamais aborder d’idées générales, et traiter avec respect cinq ou six niaiseries qui sont encore les faux dieux de chaque carrière. On dirait que n’être pas important est une insulte pour tous les importants. Je crains bien que d’ici à