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MÉMOIRES D’UN TOURISTE

donc avec des toits en charpente et non avec des voûtes que leurs églises étaient couvertes. De là les incendies fréquents. (Voir l’Histoire de Saint-Ouen.)

La voix morale que les vieilles cathédrales ont pour nous, ce qu’elles disent à notre âme lorsque nous les considérons dans un moment de calme et de tranquillité, est l’effet du style.

Dix savants peut-être, tous plus ou moins ennemis de la logique, ont espéré se faire un titre de gloire, en imposant un nom au style de ces édifices bâtis au onzième siècle avec l’argent qu’avait produit la fin du monde. Ce style s’est appelé roman, byzantin, lombard, saxon, etc. ; le public, ce me semble, n’a pas encore fait de choix ; en attendant sa décision suprême, j’adopterai le mot roman, parce qu’il indique le principal caractère des édifices construits au onzième siècle. 1o Ils furent avant tout l’imitation de l’architecture romaine[1].

  1. Je dois, ce me semble, ajouter un mot à ma définition du style. Notre âme, quand elle entend gronder le tonnerre, n’est plus terrifiée. Pour beaucoup de gens ce son, souvent magnifique par sa plénitude, produit un effet musical. Le plus nuisible des athées, Franklin, a eu l’impiété d’expliquer la foudre. Notre âme est donc bien différente de ce qu’était l’âme du Bourguignon en l’an 1200. Les églises romanes ou gothiques nous disent donc, exactement parlant, autre chose que ce qu’elles disaient à ces barbares si sûrs de l’enfer.