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ATHANASE AUGER

est-elle, monseigneur ? répondit l’abbé Auger. — Je vous ai déjà défendu, et cela expressément, de me donner ce titre lorsque nous sommes en particulier ou avec nos amis choisis. Je veux que vous me dénommiez, lorsque je suis chez vous ou avec vous et votre famille, par le nom seul de Noé, sans votre monseigneur, qui me contrarie toujours venant de votre part, et je ne veux pas non plus de celui de monsieur ; appelez-moi, vous dis-je, Noé ou mon ami ; voilà ce que je te permets, entends-tu bien, Athanase ? Et il ajoute : Voici la proposition que j’avais à te faire ; je veux, j’exige, et je l’ordonne même s’il le faut, qu’à l’avenir tu me tutoies, et plus de vous entre nous, mon très cher. Tu possèdes toute mon amitié jointe à une profonde estime méritée par ta modeste vertu exemplaire ; et, aurais-je pour ami intime le roi Louis XVI lui-même, je ne me croirais pas plus honoré que je ne le suis du vrai et beau titre d’ami que je te porte et que tu mérites si bien. — Monseigneur ! répondit Athanase. — Encore… mais je vais me fâcher tout de bon. Vous ne m’entendiez donc pas, monsieur, et m’écoutiez encore moins ? — Je vous demande pardon, dit mon oncle, permettez-moi de vous expliquer ma pensée : nous nous aimons beaucoup, j’admets même au delà de toute expression ; veuillez croire, je vous prie, à toute la pureté de mon observation que vous approuverez, je suis sûr, quand vous l’aurez entendue. Je serais honoré