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MÉMOIRES D’UN TOURISTE



Tours, le 22 juin.

À neuf heures du soir, je me suis embarqué dans une diligence qui ressemblait fort à l’arche de Noé : l’impériale était occupée par des chiens de chasse, qui semblaient fort mécontents de leur position et le témoignaient hautement ; ce qui ne m’a point empêché de souper d’abord et de dormir fort bien jusqu’à Issoudun. Vers le minuit, j’ai fait une centaine de pas sur la grande place de cette petite ville que l’on dit fort jolie. Nous sommes arrivés à cinq heures, c’est-à-dire au jour, à Châteauroux, dont j’ai été fort content. Il y avait une toile tendue au-dessus de la cour de la grande auberge, qui est un bâtiment neuf et fort propre. Je me suis cru en Provence, je me rappelais les toiles tendues sur les rues d’Avignon.

Comme cinq heures un quart sonnaient, je suis allé achever de réveiller un brave cafetier, qui ouvrait sa boutique précédée d’une petite allée de jeunes arbres : il m’a dit que le lait n’arriverait qu’à six heures ; alors je lui ai appris comme quoi de savantes religieuses avaient trouvé qu’on peut le remplacer par un jaune d’œuf. Ce grand arcane n’avait point encore pénétré jusqu’à Châteauroux. Le bon cafe-