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MÉMOIRES D’UN TOURISTE

il se donnait des peines infinies pour m’apprendre, sans faire semblant de rien, qu’il avait des chevaux, et que, de plus, ces chevaux allaient venir le chercher, et moi je ne comprenais pas. Quand nous sommes arrivés dans ce village dont j’ai oublié le nom, il n’y avait point de chevaux ; le fat a disparu comme un trait. J’ai lu César jusqu’à Châtillon. Je faisais querelle, dans mon esprit, à George Sand qui nous a fait de si belles descriptions des bords de l’Indre. C’est un ruisseau pitoyable, qui peut avoir vingt-cinq pieds de large et quatre de profondeur ; il serpente au milieu d’une plaine assez plate, bordée à l’horizon par des coteaux fort bas, sur lesquels croissent des noyers de vingt pieds de haut. Je cherchais de tous mes regards la belle Touraine, dont parlent avec emphase les auteurs qui écrivaient il y a cent ans, et ceux qui de nos jours les copient. J’étais destiné à ne pas la trouver ; cette belle Touraine n’existe pas.

La diligence s’arrêtant deux heures à Châtillon-sur-Indre, j’ai couru à la fameuse tour. Au milieu des énormes pans de muraille de l’ancien château s’élève un rocher, et sur ce rocher une énorme tour ronde de trente pieds de haut, et sur cette tour une seconde qui a