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MÉMOIRES D’UN TOURISTE

publiés, et toutes les ouvrières de Naples ont été mises en réquisition pour un trousseau magnifique.

La veille du mariage, le fils de l’apothicaire a eu l’idée d’apporter un énorme bouquet à sa prétendue ; il l’a longtemps entretenue en particulier sur la terrasse du jardin, à dix pas de la princesse. Mais son attention n’a pas eu de succès. Sa figure d’apothicaire, passionnée, a su inspirer un courage de répugnance qui s’est trouvé plus fort que la terreur que l’altière princesse sème autour d’elle. La jeune personne n’a pas osé lui parler, mais elle est allée pleurer chez le majordome napolitain, personnage énorme et jovial, sur lequel l’extrême respect que les gens du Nord éprouvent pour leurs princes n’a qu’une influence modérée. La jeune nièce lui a déclaré qu’elle aimait mieux mourir que d’épouser l’apothicaire, que sa répugnance était trop invincible, etc., etc.

— Mais pourquoi ne pas le dire plus tôt ? répétait le Napolitain ; voilà une belle communication à faire à Son Altesse !

Comme les pleurs de la jeune personne redoublaient, le cœur du Napolitain a été touché. La sensibilité italienne n’est pas encore desséchée, même par le métier de courtisan.

— Eh bien ! je parlerai, a dit enfin le