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DE L’ÉDITEUR

ont tout intérêt à bien connaître les travaux, même imparfaits, de leurs prédécesseurs : « Chaque homme de génie doit brocher pour soi une poétique ou un commentaire de Molière. Mais pour les autres, à quoi est-il bon ? À rien, absolument à rien : qu’un sot croie en Helvétius ou au catéchisme, il n’en est pas moins également sot. Mais si Collé eût lu jeune ce commentaire, peut-être eût-il fait quelque bonne comédie de plus. Un poète comique est un Collé greffé sur un Machiavel[1]. »

Trois ans avant de tracer ces lignes, Beyle avait à Milan fiévreusement broché ce commentaire de Molière qu’il jugeait indispensable à son propre génie et qui, à l’en croire, eût donné du machiavélisme au jeune Collé. C’était en 1813, au début de novembre, dans l’intervalle des trop rares rendez-vous que lui accordait sa maîtresse Angela Pietragrua. Il trompait alors son oisiveté et sa jalousie, en relisant les Précieuses ridicules, le Tartuffe, le Misanthrope… et ses remarques nouvelles, qui ne sont pour la plupart que l’aboutissement d’un travail déjà en partie élaboré, il les amalgamait patiemment avec les notes laissées au cours de précédentes et

  1. Écrit le 8 mars 1816 sur les feuillets de garde du Molière édition Petitot, qui lui appartenait.