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MOLIÈRE

de Télémaque, les caractères n’y sont pas marqués par assez de traits. Tartuffe par exemple gagne une grande fortune à bon marché. Il n’est embarrassé qu’une fois, à l’accusation de Damis, et il se justifie avec tant de facilité que réellement il n’y a pas de mérite. Le personnage du vieil évêque est un premier aperçu dans un moment où malgré moi je pense à plusieurs choses (je crains que la comtesse S. ne dissimule avec moi, and should beliewe me the auth. F’s letter), mais il aurait cet avantage d’embarrasser un peu Tartuffe.

Sans doute en faisant Orgon moins bête, Tartuffe aurait plus à faire. Mais faire Orgon moins crédule, n’est-ce pas le dénaturer ? Tartuffe a à ménager en général son parti, en particulier sa dupe. Pourquoi ne pas le montrer recevant un des matadors de son parti et lui donnant à déjeuner ? Mélange comique de la sensualité et du langage mortifié de la pénitence. Les repas sont froids à la scène.

Pourquoi nous montrer Orgon tout séduit ? Cela n’a-t-il pas des inconvénients analogues à nous montrer Dandin contrit et humilié, tout à fait guéri de la vanité qui lui a fait faire un mariage noble, et préparé à recevoir avec soumission tous les camouflets qu’il peut lui attirer ?