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LA COMÉDIE

au café de Foy, et dans les lieux publics, me paraît le commerce armé de deux vanités.

Toute la différence, c’est qu’au café de Foy, où se rendent de pauvres rentiers de la petite bourgeoisie, la vanité est basée sur le fond de ce qu’on dit. Chacun raconte à son tour des choses flatteuses qui lui sont arrivées. Celui qui est censé écouter attend avec une impatience mal déguisée que son tour soit arrivé, et alors entame son histoire sans répondre à l’autre, en aucune manière (il en est ainsi de tous les lieux observés par Louis).

Le bon ton qui là comme dans un salon élégant part du même principe[1] consiste au café de Foy à écouter l’autre avec une apparence d’intérêt, à sourire aux parties comiques de ses contes, et en parlant de soi à n’avoir pas l’air hagard et inquiet de l’intérêt personnel. Air que Meunier à Marseille avait tant de peine à cacher sous ses minauderies patelines, et qui paraissaient à nu chez certains courtiers provençaux qui venaient nous voir. (M. Garnier faisant dans les sucres.)

Cet intérêt personnel trop nu, dans quel-

  1. Dans une société composée d’indifférents se donner réciproquement le plus de plaisir qu’il est possible.

    Je prends mes exemples dans un salon où tout le monde peut entrer.