Page:Stendhal - Pages d’Italie.djvu/258

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du paysage ; mais ce n’est pas le paysage riant ; les tristes pins couronnent de tous côtés les collines de la ville éternelle. Quoi ! c’est ici que Camille a vécu ? C’est là, tout près de moi, que Romulus a fondé sa ville ? — L’extrême des passions est niais à noter : je me tais.

« Sommes-nous loin, dis-je à mon cocher en sortant, des Thermes de Caracalla ? — À une demi-heure. — Courons. »

Le sentiment de l’admiration profonde, le ravissement de l’antique, si je puis ainsi dire, sont encore plus vifs. Enfin je dis au cocher : « Menez-moi à Saint-Pierre » ; je monte dans la calèche et je ferme les yeux. La machine humaine ne peut résister aux sensations de cette force. Cette demi-journée-ci me récompense de tout le temps que j’ai passé à étudier l’architecture, mais à l’étudier à ma manière, sans jamais en parler à aucun homme vivant ; la petitesse et l’affectation actuelles m’auraient tout empoisonné.

Le cocher me dit : Ecco san Pietro. J’étais déjà, lorsque j’ouvre les yeux, au milieu des deux fontaines admirables, tout près de l’obélisque. Je mets pied à terre, au bas de l’escalier de Saint-Pierre ; je repousse avec colère une trentaine de pauvres, qui me poursuivent avec une insolence extrême : ils sont chez eux. Ici, un mendiant galeux