Page:Stendhal - Racine et Shakespeare.djvu/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
248
RACINE ET SHAKSPEARE

Nous n’avons pas encore, dans notre malheureuse Italie morcelée, une loi qui protège les auteurs et les libraires contre le danger de la contrefaçon. Si un livre a du succès à Milan, on le contrefait sur le champ à Turin, à Plaisance, à Lugano, à Rome, à Florence, à Naples, à Palerme, etc., etc.

Notre dictionnaire ne sera donc pas fait par un philosophe comme Johnson, richement payé par des libraires qui sont sûrs d’acquérir dans le Dictionnaire une terre d’un revenu éternel et à l’abri de tous les accidents. Les héritiers de chacun des libraires qui firent travailler Johnson retirent chaque année du dictionnaire 10 à 15 mille lire italiane. Il est vrai que les frais furent immenses. Ils payèrent chèrement six commis pendant neuf ans. Chaque commis avait six mille francs. Ils fournirent à Johnson une grande quantité de livres.

Un dictionnaire français, celui de Catineau-Laroche (voyez le Journal de la Librairie) rapporte actuellement à son auteur un revenu de 6 à 7.000 francs par les nouvelles éditions qu’on en fait sans cesse.

Par un des malheureux effets de notre morcellement, le moyen anglais, le plus sûr de tous, est à peu près impossible pour l’Italie.

Pourrons-nous employer le moyen français et réunir une Académie de quarante ou cinquante gens de lettres célèbres ?

Pas davantage. Où réunirions-nous cette Académie ? Le moyen employé par les