Page:Stendhal - Racine et Shakespeare.djvu/69

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
32
RACINE ET SHAKSPEARE

la naïve réponse de Bodoni me fait rire.

Le rire fou que nous cueillons sur le Falstaff de Shakspeare lorsque, dans son récit au prince Henri (qui fut depuis le fameux roi Henri V), il s’enfile dans le conte des vingt coquins sortis des quatre coquins en habits de Bougran, ce rire n’est délicieux que parce que Falstaff est un homme d’infiniment d’esprit et fort gai. Nous ne rions guère, au contraire, des sottises du père Cassandre ; notre supériorité sur lui est une chose trop reconnue d’avance.

Il entre de la vengeance d’ennui dans le rire qui nous est inspiré par un fat comme M. Maclou de Beaubuisson (du Comédien d’Étampes).

J’ai remarqué que, dans la société, c’est presque toujours d’un air méchant et non pas d’un air gai, qu’une jolie femme dit d’une autre femme qui danse : Mon Dieu, qu’elle est ridicule ! Traduisez ridicule par odieuse.

Après avoir ri comme un fou ce soir de M. Maclou de Beaubuisson, fort bien joué par Bernard-Léon, je pensais que j’avais senti, confusément peut-être, que cet être ridicule avait pu inspirer de l’amour à de jolies femmes de province, qui, à leur peu de goût près, auraient pu faire mon bonheur. Le rire d’un très-joli garçon, qui