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LE RIRE

Molière, homme de génie s’il en fut, a eu le malheur de travailler pour cette société-là.

Aristophane, au contraire, entreprit de faire rire une société de gens aimables et légers qui cherchaient le bonheur par tous les chemins. Alcibiade songeait fort peu, je crois, à imiter qui que ce fût au monde ; il s’estimait heureux quand il riait, et non pas quand il avait la jouissance d’orgueil de se sentir bien semblable à Lauzun, à d’Antin, à Villeroy, ou à tel autre courtisan célèbre de Louis XIV.

Nos cours de littérature nous ont dit au collége que l’on rit à Molière, et nous le croyons, parce que nous restons toute notre vie, en France, des hommes de collége pour la littérature. J’ai entrepris d’aller à Paris toutes les fois que l’on donne aux Français des comédies de Molière ou d’un auteur estimé. Je marque avec un crayon, sur l’exemplaire que je tiens à la main, les endroits précis où l’on rit, et de quel genre est ce rire. L’on rit, par exemple, quand un acteur prononce le mot de lavement ou de mari trompé ; mais c’est le rire par scandale, ce n’est pas celui que Laharpe nous annonce.

Le 4 décembre 1822, l’on donnait le Tartuffe ; mademoiselle Mars jouait ; rien ne