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PRÉFACE




Un jour, et il y a de cela cinq ou six mois, l’Académie française continuait la marche lente et presque insensible qui la mène doucement et sans encombre vers la fin du travail monotone de la continuation de son dictionnaire ; tout dormait, excepté le secrétaire perpétuel et le rapporteur Auger, lorsqu’un hasard heureux fit appeler le mot Romantique.

À ce nom fatal d’un parti désorganisateur et insolent, la langueur générale fit place à un sentiment beaucoup plus vif. Je me figure quelque chose de semblable au grand inquisiteur Torquemada, environné des juges et des familiers de l’Inquisition, devant lesquels un hasard favorable au maintien des bonnes doctrines aurait fait amener tout à coup Luther ou Calvin. À l’instant on aurait vu la même pensée sur tant de visages d’ailleurs si différents ; tous auraient dit : « De quel supplice assez cruel pourrons-nous le faire mourir ? »