Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/312

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admirable droiture ; de grande naissance et de grand nom, comme madame de la Trémoïlle, toujours souffrante aussi ; s’il se peut, moins dévote encore ; moins exclusivement française, moins altière en ses opinions, plus curieuse de nouveautés, madame de Montcalm avait un cercle beaucoup plus étendu par les idées que ne l’était celui de la princesse. Couchée sur sa chaise-longue, où la retenaient les infirmités d’un petit corps, contrefait et grêle, écoutant beaucoup, interrogeant de son grand œil noir plein de rayons et de sa parole pleine de bienveillance, madame de Montcalm n’exerçait pas une domination visible comme celle de madame de la Trémoïlle, mais son ascendant pénétrait bien plus avant. On sentait en elle la femme qui avait aimé, souffert, rêvé peut-être même une tout autre destinée. Elle ne commandait pas à la conversation ; elle n’y lançait pas le trait ; elle y maintenait sans effort l’élévation, le tour délirât, la nuance exacte et aimable. Les hommes qu’elle voyait journellement (’[aient les anciens collègues, les amis politiques du duc de Richelieu ; beaucoup de diplomates étrangers : MM. Pasquier, Mole, de Barante, Mounier, Barbé-Marbois, Pozzo di Borgo, Capo-d’Istria, le dur de Raguse, le général de Lagarde, M. Laine, etc.

Dans ce salon modeste et tranquille, point de discussions trop vives ; des entretiens où la politique n’avait pas d’acrimonie et w mêlait avec souplesse aux