Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/353

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le dur chemin de l’exil. De retour à Paris, mon mari prenait sa retraite. Il s’y croyait obligé d’honneur, bien que personnellement il n’eût point d’attaches aux princes de la branche aînée. Né en 1790, d’un père qui n’émigra point, il était entré à dix-sept ans au service, et avait fait toutes les campagnes de l’empire, en Allemagne, en Pologne, en Espagne, jusques et y compris la campagne de 1814. Il avait été grièvement blessé d’un coup de feu au combat de Nangis, en faisant à la tête de son régiment, une charge de cavalerie contre un carré d’infanterie russe, et il en restait boiteux. En fait de souverain, M. d’Agoult ne connaissait que Napoléon, en fait de régime, que l’empire militaire. Comme toute sa génération, et malgré ses origines, il ignorait les princes exilés. En 1814, il fut tout surpris d’apprendre par son oncle, l’évêque de Pamiers, que Buonaparte était un usurpateur ; qu’il y avait un roi légitime qui se nommait Louis XVIII ; que la fille de Louis XVI vivait encore; qu’elle avait eu pour ami, pour compagnon d’exil, qu’elle ramenait avec elle le frère de l’évêque, l’oncle de mon mari, le vicomte d’Agoult.

Présenté par l’évêque à ces parents ignorés, M. d’Agoult fut accueilli d’abord par eux avec une certaine réserve. Cette blessure reçue en combattant les alliés qui ramenaient nos princes, cette croix de la légion d’honneur, bien que jointe à la croix de Saint-Louis,