Page:Sterne - Œuvres complètes, t1-2, 1803, Bastien.djvu/68

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cette époque du faux brillant, il y a tant d’ouvrages plus aigres que piquans, que le public en a les dents agacées.


SUR L’ESPRIT EN MORALE.


Je préférois jadis les épîtres de Pline et la morale de Sénèque à tous les Ouvrages de Cicéron, à cause de leurs pointes répétées et de la tournure piquante de leur esprit. Je me rappelle que je trouvois Horace et Catulle plats et insipides : c’étoit quand j’admirois Martial et Cowley.

Les mets simples sont plus sains, sans doute, que les ragoûts composés ; mais, quand on a dépravé son appétit avec les seconds, il est difficile d’en revenir aux premiers. Cette comparaison est juste en littérature.

Le brillant de l’imagination et le drame des paroles peuvent fixer quelquefois la morale dans l’esprit ; mais plus souvent ils rodent autour de la tête, et ne pénètrent pas dans le cœur.

Cette opposition de mots, ces phrases à prétention remplissent les places vides de la mémoire, d’apophtegmes, qui luisent dans les écrits du jour et les cercles à la mode ; mais