Page:Stevenson - Enlevé !.djvu/103

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Cette maison est-elle à vous ou à moi ? dit-il de sa voix mordante.

Et tout à coup il éclata :

— Non, non, dit-il, ce n’est pas ainsi que je l’entends ; ce qui est à moi est à vous, David, mon garçon, et ce qui est à vous est à moi. Le sang est plus épais que l’eau, et il n’y a plus que vous et moi pour porter le nom.

Là-dessus il se mit à divaguer sur la famille et son ancienne grandeur, à raconter que son père avait commencé la maison, que lui avait arrêté les constructions, les regardant comme des prodigalités coupables.

Cela me fit songer à lui apprendre le message dont m’avait chargé Jennet Clouston.

— La gueuse ! s’écria-t-il, c’est la douze cent quinzième fois depuis que je l’ai fait vendre. David, il me faudra la voir rôtir sur un feu de tourbe avant que nous soyons au pair. Une sorcière, une vraie sorcière ! je vais sortir et parler au clerc de la Session.

En parlant ainsi, il ouvrit un coffre, dont il tira un gilet et un habit bleus très anciens et très bien conservés, un chapeau de castor assez bon, l’un et l’autre sans dentelle.

Il s’en revêtit à la hâte, et prenant une canne à côté de la commode, il se disposait à partir, quand une pensée l’arrêta.

— Je ne peux pas vous laisser tout seul chez moi, dit-il ; il faut que je vous laisse dehors après avoir fermé à clef.

Le sang me monta à la figure.

— Si vous me fermez la porte, dis-je, c’est la dernière fois que vous m’aurez vu sur un pied d’amitié.

Il devint très pâle et pinça les lèvres.

— Ce n’est pas, dit-il en regardant le plancher d’un